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Visite du premier ministre chinois en Inde : amitié ou rivalité de deux puissances?

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Trois jours, deux géants, une amitié. A New Delhi,  le premier ministre indien Manhoman Singh et son homologue chinois Li Keqiang ont enfilé leur plus beau costume pour célébrer l’amitié entre leur pays. Une amitié bien compliquée entre deux puissances aux ambitions régionales.

En avril dernier, des soldats de l’Armée Populaire de Libération (APL), armée officielle de la Chine, avaient tenté une incursion en Ladakh indien. Depuis la guerre sino-indienne de 1962, ce territoire fait l’objet de revendications bilatérales complexes. L’armée chinoise occupe toujours le territoire revendiqué par l’Inde de l’Aksai Chin (partie du Ladakh annexée par la Chine) tandis que la région indienne d’Arunachal Pradesh est une exigence renouvelée par Pékin. Ces ambitions territoriales de deux puissances à l’étroit enveniment les relations diplomatiques : au moindre coup de feu, les armées s’agitent et le monde retient son souffle. A la suite du retrait des troupes des deux camps le 5 mai, les deux dirigeants voulurent passer outre ce différend, sans toutefois le régler.

Car l’Asie est un immense terrain de jeu d’échecs entre deux joueurs redoutables. L’incursion progressive de la Chine dans la géopolitique sud-asiatique bouleverse la diplomatie indienne depuis quelques années. Soucieuse d’affirmer son indépendance géopolitique, la Chine entreprend une politique bicéphale, débutée avant la crise mais avivée depuis 2008:

1)      diversification commerciale en Asie et Afrique afin de réduire sa dépendance à l’Occident en crise ;

2)      indépendance énergétique grâce au contrôle des puits et des routes (terrestres comme maritimes).

C’est pourquoi Pékin développe ses relations commerciales avec ses voisins asiatiques. Pékin est ainsi devenu le premier partenaire commercial de Dacca (Bangladesh), a multiplié par deux en 5 ans ses échanges avec Katmandou (Népal) et fait les yeux doux à Islamabad et à la junte birmane. Parallèlement, la Chine tente à tout prix de s’émanciper des grandes routes commerciales mondiales et érige des ports à Chittagong au Bangladesh, Sittwe en Birmanie, Colombo au Sri Lanka et Gwadar au Pakistan. De cette manière, un « collier de perles » qui permet de relier les puits moyen-orientaux aux stations-service de Shanghai entoure et isole l’Inde.

Face à cette ingérence, New Delhi souhaite relancer l’intégration régionale : relance de la zone de libre-échange SAARC qui ne représente que 4% des exportations du sous-continent indien, distribution d’aides au Sri Lanka, soutien sans faille au Népal, rapprochement avec le Pakistan sur divers sujets dont le fameux « gazoduc de la paix » reliant le Turkménistan à l’Inde par l’Afghanistan et le Pakistan. Mais bien des efforts sont à réaliser encore, en particulier sur les questions hydriques qui enveniment les relations avec le Pakistan et le Bangladesh et territoriales avec le Pakistan, éternel ennemi du régime.

A l’horizon 2030, alors que la Chine s’installera sur le trône de première puissance économique mondiale, l’Inde montera sur le podium. Deux puissances mondiales auront alors une même ambition régionale. Les tensions historiques risquent de refaire surface, comme le prouve cette résurgence des revendications frontalières le mois dernier. Un sommet risque de n’y rien faire.

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